Témoignages écrits
Ce choix d’auteurs et de textes est lié à la création de la Cie Beaudrain de Paroi, On t’embrasse pour la vie, présentée au Théâtre du Pavé du 16 au 18 novembre 2018 dans le cadre du Centenaire de l’Armistice.
Paroles de Poilus
Extrait des Lettres et carnets du front (1914-1918) de Jean-Pierre Guéno (Sous la direction de)
» Des classes 12 et 13, nous sommes une quarantaine au maximum sur cent cinquante – tout le reste est mort, blessé ou prisonnier. Un matin de septembre aussi clair se lève sur les vignes et les coteaux de la Marne ; le clocher du village émerge au-dessus des vapeurs du matin que dissipe le soleil, les dernières roses de l’automne fleurissent encore dans les jardins, et les vers de Ronsard me chantent douloureusement un souvenir. »
Étienne Tanty, 23 septembre 1914
Poèmes à Lou
Œuvres poétiques (extraits) Poèmes à Lou, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1959.
À Madame la comtesse, Lou de Coligny-Châtillon
Le 11 novembre 1914 à Nice où elle soigne les blessés de guerre
La fumée de la cantine est comme la nuit qui vient
Voix hautes ou graves le vin saigne partout
Je tire ma pipe libre et fier parmi mes camarades
Ils partiront avec moi pour les champs de bataille
Ils dormiront la nuit sous la pluie ou les étoiles
Ils galoperont avec moi portant en croupe des victoires
Ils obéiront avec moi aux mêmes commandements
Ils écouteront attentifs les sublimes fanfares
Ils mourront près de moi et moi peut-être près d’eux
Ils souffriront du froid et du soleil avec moi
Ils sont des hommes ceux-ci qui boivent avec moi
Ils obéissent avec moi aux lois de l’homme
Ils regardent sur les routes les femmes qui passent
Ils les désirent mais moi j’ai des plus hautes amours
Qui règnent sur mon cœur mes sens et mon cerveau
Et qui sont ma patrie ma famille et mon espérance
À moi soldat amoureux soldat de la douce France
Guillaume Apollinaire (1880-1918) Lire l’ensemble des poèmes
Portrait de Lou, calligramme d’Apollinaire
La main coupée
de Blaise Cendrars (1887-1961)
L’offensive du Printemps
[…] L’ « offensive du printemps », ce grand tralala des états-majors qui n’avait pas abouti. (…) Il paraît que c’est Pétain qui avait monté ça. Pétain ou pas Pétain, c’est tout un. Comme le chantaient les hommes en descendant du Chemin des Dames :
Jean de Nivelle nous a nivelés
Et Joffre nous a offerts à la guerre !
Et Foch nous a fauchés…
Et Pétain nous a pétris…
Et Marchand ne nous a pas marchandés…
Et Mangin nous a mangés !
Le nouveau, pour nous, c’est que le printemps nous travaillait et qu’après cette saignée vaine et héroïque, l’arrière commença à se remuer.