Les petits plats dans les grands

« La salle à manger est grande parce que c’est là qu’on reçoit les invités, mais la cuisine est petite, de plus en plus petite. Mais on y mange toujours, on s’y entasse – quand l’un sort tous les autres doivent se lever mais on ne l’a pas abandonnée. On voudrait désapprendre aux gens à manger dans la cuisine et c’est là qu’ils se retrouvent, qu’ils vont tous le soir venu, c’est là qu’il fait chaud et qu’on reste avec la mère qui fait la cuisine tout en parlant. » Marguerite Duras « La vie matérielle », p. 74

Une expression du XIXe siècle

Photographie de Georges Ancely, Intérieur de ma salle à manger, 1893
Photographie de Georges Ancely, Intérieur de ma salle à manger, 1893, inv. 009-0-25
Plan de "table dressée pour un repas simple", dans "La véritable cuisine de Tante Marie", 1955
Plan de « table dressée pour un repas simple », dans « La véritable cuisine de Tante Marie », 1955
Plan de "Table dressée à la Russe, Repas de cérémonie", dans la "Véritable cuisine de Tante Marie", Paris, 1955
Plan de « Table dressée à la Russe, Repas de cérémonie », dans la « Véritable cuisine de Tante Marie », Paris, 1955

L’expression « mettre les petits plats dans les grands » serait apparue au début du XIXe siècle. Elle signifie préparer une belle table, une cuisine soignée. C’est ce qui est préconisé par Tante Marie dans livre de « La véritable cuisine de famille » de 1955 :

« Une maîtresse de maison doit tout mettre en œuvre pour contenter ses invités et leur rendre sa maison agréable (…) » 

Il faut donc éviter de « mettre les pieds dans le plat » ou pire « d’en faire tout un plat ». 

« La maîtresse de maison a également la tâche délicate de placer ses invités avec discernement. Avec le Maître de maison, ils occupent le milieu de la table, en face l’un de l’autre. Les places d’honneur sont à leur droite et se donnent à la dame et au monsieur les plus âgés ou aux personnes auxquelles on veut rendre spécialement une politesse. Les places de gauche sont occupées par la seconde dame et le second monsieur que l’on veut honorer, également par rang d’âge parmi les invités. « 

Couverture du livre de cuisine "Tante Marie" édition de 1955, coll. particulière
Couverture du livre de cuisine Tante Marie édition de 1955, coll. particulière
Banquet des écrivains et artistes dramatiques français, à l'occasion de l'anniversaire de la naissance de Molière, présidé par M. le baron Taylor. Lithographie d'après le dessin de Marcelin, 1859. Inv. 5215
Banquet des écrivains et artistes dramatiques français, à l’occasion de l’anniversaire de la naissance de Molière, présidé par M. le baron Taylor. Lithographie d’après le dessin de Marcelin, 1859. Inv. 5215

La belle vaisselle

Les pièces d’argenteries étaient présentées sur des meubles spéciaux appelés argentiers. La ménagère en argent et plus largement l’argenterie était représentative de la fortune des familles. Elles constituaient aussi une réserve d’argent. L’argenterie pouvait être vendue ou mise en gage pour faire face à une dépense imprévue. C’est ainsi que le roi Louis XIV envoya son argenterie, comprenant un important mobilier (commodes, consoles, etc), à la monnaie pour être fondue.

Fourchette en argent par l’orfèvre Guillaume David, Bordeaux, 1776. La ménagère en argent et plus largement l’argenterie (n° 3) constituait un moyen de montrer leur fortune et d’asseoir leur crédit pour les familles.
Fourchette en argent par l’orfèvre Guillaume David, Bordeaux, 1776
 Plat en argent par l’orfèvre Louis II Dulaurier, Toulouse, 1775 avec armoiries comtales.
Plat en argent par l’orfèvre Louis II Dulaurier, Toulouse, 1775 avec armoiries comtales.
Détail des armoiries comtales
Détail des armoiries comtales
Assiette à décor jaune, faïence, Toulouse, XVIIIe siècle
Assiette à décor jaune, faïence, Toulouse, XVIIIe siècle

Assiette à décor jaune, faïence, Toulouse, XVIIIe siècle. Cette assiette faisait partie d’un service de table. Tout comme l’argenterie, il était indispensable à toute bonne maison. Son décor principal, la rose, se retrouve sur les autres éléments du service.

Motif de la rose, centre de l'assiette
Corbeille à fruits, faïence, Toulouse, deuxième moitié du dix-huitièmesiècle.
Corbeille à fruits, faïence, Toulouse, deuxième moitié du XVIIIe siècle.

Lors des repas de cérémonie, « le milieu de la table [devait] être occupé par une corbeille garnie de fleurs et de fruits, selon la saison ». En faïence, celle-ci imite la forme du panier et l’entrelacement de la vannerie.

Légumier oblong à contours, faïence, Toulouse, XVIIIe siècle.
Légumier oblong à contours, faïence, Toulouse, XVIIIe siècle.

Le couvercle est décoré d’un paysan revenant de la chasse. Il porte un lapin accroché à un bâton. De l’autre côté faisant pendant, une femme assise. L’ensemble est orné de longues tiges de fleurs stylisées. Les prises évidées sont en forme de mufle.

couvercle
Soupière, décor à raisins vrillés, XVIIIe siècle, faïence, Toulouse, inv. 003.2.19
Soupière, décor à raisins vrillés, XVIIIe siècle, faïence, Toulouse, inv. 003.2.19
Saladier, faïence, Toulouse, dix-huitième siècle
Saladier, faïence, Toulouse, XVIIIe siècle
Moutardier, faïence, Toulouse, XVIIIe siècle, inv. 003.2.5
Moutardier, faïence, Toulouse, XVIIIe siècle

La soupière : un récipient indispensable

« Ne pas confondre soupe et potage. La première est familiale, bon enfant légèrement vulgaire ; le second est sérieux et distingué ; moins cependant que le consommé, très élégant celui-ci, et plus difficile à réussir qu’il n’y paraît… » (André Castelot, L’histoire à table, p. 579) Autrefois, d’ailleurs, la soupe était la tranche de pain qu’on trempait dans le potage. Avec le temps, la soupe est devenue plus sophistiquée comme le récipient qui prit le nom de soupière.

Soupière, faïence, Martres-Tolosane, 2e moitié du XVIIIe siècle, inv. 003.2.94
Soupière, faïence, Martres-Tolosane, 2e moitié du XVIIIe siècle, inv. 003.2.94
Soupière dite "au Chinois", 2e moitié du XVIIIe siècle, Toulouse, inv. 003.2.52
Soupière dite « au Chinois », 2e moitié du XVIIIe siècle, Toulouse, inv. 003.2.52
Soupière, décor à raisins vrillés, XVIIIe siècle, faïence, Toulouse, inv. 003.2.19
Soupière, décor à raisins vrillés, XVIIIe siècle, faïence, Toulouse, inv. 003.2.19
Soupière en étain, XIXe siècle (?)
Soupière en étain, XIXe siècle

La fée clochette !

Autre objet indispensable dans les grandes maisons, la clochette d’intérieur. Selon le Nouveau Larousse Illustré (v. 1900), elle serait pas apparue avant le XVIe siècle. Surtout répandue à partir du XVIIIe siècle, la clochette permet d’appeler les serviteurs afin de servir et desservir les plats. La sonnette se développera au XIXe siècle pour devenir un objet sophistiqué dont la fonction est dissimulée par une décoration extravagante comme celles du musée Paul-Dupuy.

Clochette d'intérieur en forme de personnage chinois, inv. 16157
Clochette d’intérieur en forme de personnage chinois, inv. 16157
Clochette, XIXe siècle, inv. 16156
Clochette, XIXe siècle, inv. 16156
Clochette à l'effigie de Napoléon, XIXe siècle, inv. 16154
Clochette à l’effigie de Napoléon, XIXe siècle, inv. 16154
Clochette d'intérieur en forme de cygne, inv. 8243
Clochette d’intérieur en forme de cygne, inv. 8243